La compagnie argentanaise Passerelles théâtre a pris ses « Quartiers d’été » à l’espace René-Cassin. Jusqu’à jeudi, une quinzaine d’habitants(e)s questionnent ces cinq derniers mois. Avec l’art et la manière.
Derrière son masque, Gilbert passe la langue avec toute l’espièglerie qu’il a dû garder pour lui, pendant le confinement. « Quatre mois sans répétitions, c’est long », soupire cet habitué des projets de la compagnie argentanaise Passerelles théâtre. Il baisse son masque, réitère sa grimace, à bonne distance de la photographe. C’est dans la boîte !
Émilie Sfez est l’une des intervenantes du projet Nous citoyen(ne)s, créons ! mené auprès des habitants des quartiers prioritaires d’Argentan et que la compagnie a dû suspendre en plein vol, au printemps dernier, à cause du Covid-19. « Dès le début de cet atelier, le premier depuis la crise sanitaire, le confinement a été omniprésent dans les conversations, resitue la jeune femme. Porter un masque nous a aussi beaucoup questionnés. Comment voir les expressions de chacun ? »
La photographe a lancé un premier défi à la quinzaine d’Argentanaises et d’Argentanais qui ont fait le déplacement, salle René-Cassin : conserver la même expression, avec et sans masque, pour ensuite associer et confronter les deux visions.
En attendant la rentrée
« C’est la première fois que nous organisons de tels Quartiers d’été qui n’entrent pas dans le projet Nous citoyen(ne)s, créons ! abonde Clotilde Labbé, directrice artistique de la compagnie. C’est un dispositif en réaction aux circonstances, à cette crise sanitaire qui nous a empêchés de nous voir pendant des mois. Les rencontres sont très rapprochées, s’étirant sur près d’une semaine. L’idée était avant tout de nous retrouver et de se pencher sur ce que nous venons de traverser. »
La semaine comprendra aussi du théâtre, de la danse. Et là, les intervenantes en sont encore à apprivoiser le contexte. Masque ou visière, il faut faire avec. Tout comme il faut garder ses distances. « Ce temps nous permet aussi de chercher des solutions que nous pourrons réinvestir à la rentrée », espère Sophie Distefano, chorégraphe.
Répétitions publiques
Côté théâtre, le tâtonnement passe par un flot de mots que les uns et les autres ont laissé s’échapper, au fil de conversations parfois un peu décousues, pressées. « Ces mots serviront de base à des improvisations, des chansons ou des textes écrits », imagine déjà Clotilde Labbé.
« Ce confinement, c’était atroce, reprend Chantal, une autre participante. Moi qui d’habitude ai six activités… Rester enfermée ! » Annie, elle, savoure la reprise du théâtre, tirant un trait sur les mois passés : « Être ici me fait du bien, me pousse à sortir de chez moi et à oublier mes problèmes. »
Ces ateliers gratuits et ouverts à tous se poursuivent jusqu’à jeudi, à l’espace René-Cassin et ne donneront pas lieu à restitution. Deux répétitions publiques du spectacle de la Cie, « La nuit juste avant les forêts » sont par ailleurs prévues, ce mercredi 19 août, à partir de 10 h (espace Cassin) et de 14 h 30, vendredi 21 août, salle Maupassant. Le projet Nous citoyen(ne)s, créons ! reprendra en septembre.
Marie Lenglet, Ouest france 18 août 2020